Batteries, stockage d’électricité et carburants de remplacement : McGill dans la course à l’innovation
Le Québec s’est engagé résolument dans la transition énergétique en promettant d’électrifier totalement ses transports, son chauffage et une partie du secteur industriel d’ici 2050. Les deux paliers de gouvernement et les multinationales investissent des milliards pour développer une filière québécoise de production de batterie. Hydro Québec dépose son plan d’action 2035 afin d’atteindre la cible de carboneutralité à l’horizon 2050.
C’est dans ce contexte que l’Université McGill a créé en 2021 le Centre d’innovation en stockage et conversion d’énergie (McISCE), qui réunit une cinquantaine de chercheurs et plus de 150 étudiants des deuxième et troisième cycles.
« Actuellement, les pouvoirs publics et les investisseurs priorisent beaucoup la production d’énergie verte, et c’est très bien, mais le problème du stockage à grande échelle de cette énergie demeure presque entier, notamment pour les réseaux électriques, de même que la conversion de grands procédés industriels », dit Sylvain Coulombe, ingénieur physicien et directeur du McISCE.
McGill a également organisé, conjointement avec le Forum économique international des Amériques et l’Université du Québec à Trois-Rivières, une conférence d’une journée intitulée « Chargé à bloc : à l’avant-garde de l’énergie propre ». Tenu le 15 novembre, cet événement réunissait des chercheurs, des dirigeants d’entreprises et des hauts fonctionnaires ainsi que les ministres Pierre Fitzgibbon (Économie, Innovation et Énergie) et Steven Guilbeault (Environnement et Changement climatique).
« Ça faisait un an qu’on préparait cet événement », explique Benoit Boulet, ingénieur électricien et vice-principal adjoint à l’innovation et les partenariats à l’Université McGill. « Le Québec est en train de réorganiser en profondeur son réseau électrique, en plus d’investir massivement dans une nouvelle industrie, la filière batterie, et toute sa chaîne d’approvisionnement. Notre intention est de signaler ce qui suit aux entreprises et aux gouvernements : “La recherche fait aussi partie de la chaîne. Ça va vous prendre des milliers d’ingénieurs et de scientifiques.” »
Stockage et conversion
« Maintenant que l’électrification des transports est bien amorcée, il reste énormément de développement à faire pour rendre les batteries plus performantes », explique Sylvain Coulombe. « Sans compter le problème du recyclage. Trop de batteries sont encore conçues sans considération sur la fin de vie. »
Environ le tiers des chercheurs du McISCE sont en quête de nouveaux matériaux pour les anodes et les cathodes, mais aussi pour la mise au point d’électrolytes solides, qui auraient l’avantage de ne pas être inflammables. « Avec nos microscopes électroniques, nous pouvons observer le comportement de chaque atome d’une batterie », explique Benoit Boulet.
Les chercheurs de McGill explorent également des techniques différentes de stockage et de conversion de l’énergie. L’abondante énergie renouvelable du Québec permet d’envisager de produire de l’hydrogène ou de l’ammoniac « vert », qu’il suffit ensuite de faire réagir ou de « casser » pour libérer de grandes quantités d’énergie. « L’ammoniac a l’avantage d’être la molécule industrielle la plus produite au monde, dit Sylvain Coulombe. Tout ce qu’il faut pour la transporter et la contenir est déjà développé et exploité. »
Parmi les autres avenues de recherche fondamentale figure celle des carburants métalliques comme la poudre de fer ou d’aluminium. Quand elles réagissent à l’air ou à l’eau, ces métaux sous forme de poudre peuvent développer une énergie foudroyante, et ce, sans carbone. « C’est le principe à la base des moteurs-fusées de la navette spatiale, dont le carburant est de la poudre d’aluminium », explique Benoit Boulet.
Les carburants métalliques présentent un grand intérêt pour qui souhaite verdir les procédés industriels requérant beaucoup de chaleur – pensons notamment à l’acier vert ou au béton vert –, mais la première application probable sera sans doute le transport maritime, croit Benoit Boulet. « Nos chercheurs ont déjà breveté le brûleur », dit-il.
L’enjeu de l’acceptabilité
Évidemment, toutes ces solutions seront valables à condition qu’elles soient produites à partir d’énergies renouvelables et que leur coût économique soit acceptable. Parmi les volets importants des travaux du McISCE, notons l’analyse des cycles de vie des diverses filières explorées de même que de leur impact sur la société. « On va se tirer dans le pied si la solution de rechange est pire que le problème qu’on cherche à résoudre », prévient Sylvain Coulombe.
Voilà pourquoi la composition du McISCE est si particulière. En effet, ce centre d’innovation réunit non seulement des ingénieurs, des physiciens et des chimistes, mais aussi des architectes, des politologues, des économistes et des spécialistes de la communication.
« Ce serait une erreur de croire que la science et la technologie peuvent tout », affirme-t-il. Par exemple, le passage du rêve de la voiture électrique à son état d’avancement actuel illustre parfaitement le point de rencontre entre les progrès technologiques et l’évolution des mentalités. « Les nouvelles technologies doivent être comprises, adoptées et acceptées, et les scientifiques ne peuvent rien sans les sciences humaines. »
Sylvain Coulombe insiste aussi sur le fait que le McISCE s’intéresse à faire évoluer les cadres réglementaires. « En matière de transition énergétique, les politiques publiques sont aussi importantes que la recherche, et l’adéquation entre les deux est critique ».
La participation des politologues, des économistes et géographes aux recherches en la matière est donc cruciale. Les deux ingénieurs y voient un enjeu de justice sociale. « La maison efficace ou la voiture électrique, dit Sylvain Coulombe, ça ne marchera pas si elles sont hors de prix pour la moitié de la population. »
Ce dernier se réjouit de voir les jeunes chercheurs particulièrement soucieux des retombées sociales de leurs travaux. « Dans ma génération, on était presque strictement technique, et on en est venu à autre chose. Mais la génération montante se pose ces questions spontanément. Ça me donne beaucoup d’espoir. »
Poursuivre la lecture sur le sujet
RDV En route 2024! attire un grand nombre de candidats intéressés par les métiers et les formations du secteur des transports électriques et intelligents
Montréal, le 18 mars 2024 — Propulsion Québec, la grappe des transports électriques et intelligents (TEI), avec la participation financière du gouvernement du Québec, a donné aujourd’hui le coup d’envoi de son événement phare de recrutement de main-d’œuvre, RDV En Route 2024 !, en présence de nombreux dignitaires et membres de l’industrie. Un grand nombre de […]
Lire la suiteLa FCSSQ : une institution aux premières loges d’une main-d’œuvre qualifiée répondant aux besoins du marché du travail
Au cœur de tous les enjeux du système public d’éducation, la Fédération des centres de services scolaires du Québec (FCSSQ) met son expertise au service du réseau afin de renforcer l’excellence et l’innovation, notamment au bénéfice de la qualification de la main-d’œuvre.
Lire la suitePlanifiez votre relève avec Polytechnique Montréal, un savoir durable!
Dans le but de former une relève responsable, engagée et outillée pour répondre aux besoins de la société, Polytechnique Montréal s’est engagée à renforcer la place du développement durable dans tous ses programmes de formation.
Lire la suiteLa FSG : un vaste terrain de jeu pour propulser l’électrification des transports
Par la variété des dimensions auxquelles touchent les transports électriques et intelligents, il est plus que nécessaire de solidifier le processus de développement des projets avec une collaboration multidisciplinaire. En étant la seule faculté au Québec rassemblant l’expertise de scientifiques, d’ingénieures et d’ingénieurs sous un même toit, la Faculté des sciences et de génie (FSG) de l’Université Laval est l’endroit par excellence pour apprendre à maîtriser ces projets complexes et novateurs!
Lire la suiteÉlectrification d’une voiture de course Formule SAE
Formule ETS, un club étudiant de l’École de technologie supérieure (ÉTS) a embrassé la transition énergique en relevant un défi de taille : le passage d’un moteur thermique à un train tout électrique. Cette transformation a ouvert la voie à plusieurs améliorations et de meilleures performances lors des compétitions. L’an dernier, Formule ETS remportait la 1re place à la FSAE Michigan, la plus prestigieuse compétition en Amérique du Nord.
Lire la suiteVers un avenir électrique : Les défis et opportunités d’une grande transition pour la Société de transport de Laval
Alors que le Québec s’est engagé à diminuer massivement ses émissions de gaz à effet de serre, le transport en commun représente un secteur clé pour notre avenir collectif et joue un rôle important dans la gestion des nombreux enjeux de congestion routière. Dans ce contexte, l’électrification du transport public est aussi un vecteur de développement durable et de lutte aux changements climatiques.
Lire la suiteÉlectrifier les talents : nouvelles formations et métiers émergents pour répondre au besoin croissant de l’industrie des transports électriques
Élexpertise – Comité sectoriel de la main d’œuvre de l’industrie électrique et électronique, avec le soutien de Propulsion Québec et la participation du Cégep de St-Jérôme, publie ce jour une cartographie des besoins de formations et des nouvelles compétences des professions liées à la conception et à la fabrication de véhicules électriques.
Lire la suiteHOMMAGE AUX FEMMES DANS NOTRE ÉCOSYSTÈME : Portrait de la situation dans le domaine public
Le secteur du transport a longtemps été composé à très grande majorité d’hommes. Depuis une dizaine d’années, les femmes prennent de plus en plus place aux tables de discussion, dans la direction et sur les conseils d’administration de différentes sociétés et organisations phares pour notre écosystème.
Lire la suiteLeddarTech : un logiciel automobile au service des systèmes d’aide à la conduite et de conduite autonome
Basée à Québec, Canada, LeddarTech est une entreprise de logiciels automobiles fondée en 2007 qui développe et propose des solutions de perception complètes permettant le déploiement d’applications ADAS et de conduite autonome.
Lire la suiteLes politiques industrielles traceront-elles l’avenir des industries québécoises ?
L’économie québécoise – et plus largement mondiale – fait face à des enjeux multiples : crise climatique, problèmes d’approvisionnements, pénuries de main d’œuvre, inflation etc. Bien que le Québec regorge de ressources, de savoir-faire et d’expertises, un exercice pour structurer, planifier les actions et développer les activités industrielles est maintenant à l’ordre du jour.
Lire la suite