Projet-pilote de véhicule minier électrique

Publié le 29 octobre 2024 Propulsion Québec Projet

Mise en contexte

Le projet, lancé le 19 février 2020, vise à valider la viabilité des camions lourds électriques pour l’exploitation d’une mine à ciel ouvert. Un consortium de partenaires a collaboré à l’électrification d’un camion Western Star 6900 XD, spécialement adapté aux besoins miniers. Un chargeur dédié a été développé pour recharger le véhicule, et la motorisation électrique a été conçue pour répondre aux exigences spécifiques de l’exploitation.

La phase de conception a duré jusqu’en septembre 2020, incluant des simulations et des tests pour optimiser le dimensionnement du véhicule. Après approbation, une conception détaillée a été élaborée jusqu’en septembre 2021, aboutissant à l’assemblage du véhicule en décembre 2022. Les essais du camion se sont déroulés entre janvier 2023 et mars 2024 de manière intermittente étant donné entre autres le désir de le tester sous différentes conditions climatiques.

Trois périodes d’essais :

  1. Janvier à avril 2023 : essais de fonctionnement des systèmes de sécurité (stationnement de l’IVI)
  2. Avril à août 2023 : essais en condition contrôlées et validation des performances (réalisés sur la route près de l’IVI)
  3. Août 2023 à mars 2024 : essais en condition réelle chez Uniroc

Objectifs du projet

  • Démontrer que la technologie de véhicule minier 100 % électrique à batterie répond aux besoins de l’industrie et peut prendre sa place dans l’exploitation d’une mine à ciel ouvert au Québec ;
  • Valider les hypothèses de conception du prototype électrique (groupe motopropulseur, batterie, gestion thermique et contrôle véhiculaire) et de son système de recharge ;
  • Acquérir des données pour optimiser l’utilisation du prototype électrique en situation d’opération représentative (économie d’énergie et diminution des coûts de production) ;
  • Évaluer les réductions de GES de cette nouvelle technologie par rapport aux technologies existantes ;
  • Convertir un camion diesel en une version entièrement électrique adaptée aux spécificités de l’exploitation minière ;
  • Effectuer des essais dans un environnement contrôlé pour évaluer le bon fonctionnement du camion (freins, motorisation, sécurité) ;
  • Valider les plages d’opération des systèmes du véhicule dans des conditions réelles contrôlées et comparer les résultats avec les spécifications de conception ;
  • Tester le véhicule dans un cycle d’opération réel incluant chargement, transport, déchargement et retour à vide, pour simuler des conditions d’exploitation minière ;
  • Recueillir des données pour le déverminage logiciel, la validation des performances et le fonctionnement du véhicule dans des contextes variés ;
  • Tester une borne de recharge spécifique, développée pour répondre aux besoins énergétiques du camion électrique, sur un autre site minier après les essais.

Méthodologie du projet

  • Identification des besoins : analyse des performances des véhicules diesel et électriques, en prenant en compte les réductions de capacité de chargement de 11,7 % dues à l’ajout de batteries et l’impact sur le poids total.
  • Élaboration des solutions : proposition de plusieurs configurations pour optimiser la motorisation électrique tout en tenant compte de la constance du couple électrique par rapport au moteur diesel.
  • Conception de l’infrastructure de recharge : développement d’une borne de recharge de 1MW adaptée à l’industrie minière et utilisation de bornes de recharge standards, y compris une borne de niveau 3 (ABB, 24 kW) pour les essais à l’IVI et une borne de niveau 2 (EVduty, 19,2 kW) pour les essais chez Uniroc, bien que la puissance ait été ajustée à 12,44 kW pour des raisons techniques.
  • Collecte de données :
    • Mise en place d’un système d’acquisition pour collecter des données quantitatives sur les performances du véhicule via les bus CAN, avec des capteurs pour mesurer la température, l’accélération et la localisation.
    • Recueil de données qualitatives grâce à un chauffeur dédié, permettant d’obtenir des retours d’expérience cohérents et précieux.
  • Phases de tests :
    • Phase A – stationnement : Validation du bon fonctionnement des systèmes du véhicule, y compris les systèmes hydrauliques, pneumatiques et de sécurité.
    • Phase B – route de construction fermée : Caractérisation des performances et de l’autonomie du véhicule, en effectuant des essais ponctuels et un circuit d’essais. Mesures des vibrations sur les batteries pour confirmer les hypothèses de conception mécanique.
    • Phase C – carrière d’Uniroc : Réalisation d’essais en conditions réelles sur des parcours variés, en tenant compte des différences de chargement et de température. Analyse des résultats pour estimer les performances du véhicule.
  • Suivi et ajustements : évaluation continue des données collectées pour affiner les performances du véhicule et procéder aux ajustements nécessaires, tout en s’assurant que les systèmes répondent aux exigences d’exploitation minière.

Résultats obtenus

Le projet d’essai du véhicule électrique a produit des résultats variés lors de trois parcours distincts. Les essais ont révélé des performances plus qu’intéressantes, notamment en termes d’autonomie et de consommation d’énergie, avec des variations notables selon les conditions de parcours.

Résultats des essais

  • Performances des parcours : le parcours le plus efficace affiche une distance de 37 km, un dénivelé maximal de 30,4 m, et une vitesse moyenne de 9,2 km/h. En revanche, l’un des parcours, bien que plus court, a révélé une consommation d’énergie significativement plus élevée.
  • Autonomie et consommation : les autonomies estimées ont varié entre 422 et 585 minutes, tandis que la consommation électrique a fluctué de 4,51 kWh/km à près de 10 kWh/km. L’effet de la température sur l’autonomie a également été évalué, indiquant une perte d’environ 19,7 % en hiver. Une recharge complète du véhicule permet de 6 à 9 heures d’autonomie (dépendamment de la température) dans le contexte opérationnel conventionnel d’une mine à ciel ouvert de 80 m d’élévation.
  • Économie de gaz à effet de serre (GES) : Si utilisé au Québec, le véhicule minier électrique permet une réduction de GES allant jusqu’à trois fois moindre (66 %) sur le cycle de vie total du camion selon les estimations faites précédemment. Avec son utilisation, des économies pouvant atteindre plus de 400 000 litres de diesel sur la durée de vie du camion peuvent être constatées.
  • Efficacité de recharge : les bornes de recharge ont montré des temps de recharge variant de 23,1 heures à 61,1 heures selon la puissance puisque ce sont des bornes de recharge de « faible puissance ». Un potentiel de recharge rapide à 1 MW pourrait réduire ce temps à 1-1,5 heures dans un contexte d’utilisation en situation commerciale.
  • Analyse économique : les coûts d’opérations estimés sur 10 ans ont révélé que le véhicule électrique, bien que légèrement plus coûteux à utiliser avec une borne de 475 kW (+ 0,5 %), pourrait devenir plus économique avec une borne de 50 kW, affichant une réduction des coûts de 66,07 % par rapport au diesel. Le coût de possession quant à lui, avec une borne de 475 kW, subit une augmentation de 18,99 % et une réduction de 9,75 % avec une borne de 50 kW.

Commentaires qualitatifs

Les retours d’expérience des conducteurs ont mis en avant des performances comparables, voire supérieures, à celles des véhicules diesel, malgré quelques problèmes techniques rencontrés avec les batteries étant donné que le camion était un prototype. Les délais d’activation du véhicule et la nécessité de recharge rapide ont également été soulignés comme des points d’amélioration.

Un rapport de l’IVI a démontré le potentiel du véhicule électrique dans un environnement opérationnel, tout en identifiant des pistes d’optimisation pour l’autonomie, la recharge et la fiabilité. Les résultats suggèrent que, malgré les défis rencontrés, le passage à un véhicule électrique pourrait offrir des avantages économiques et environnementaux significatifs à long terme.

Prochaines étapes pour les parties prenantes

Depuis la fin du projet, le véhicule électrique minier a été rapatrié au site minier de NMG. Il servira surtout de démonstrateur et pourrait potentiellement servir à des travaux légers. Pour l’instant, le tout se déroule bien et la formation avec les employés concernés par ce secteur est prévu pour décembre 2024. NMG a utilisé le camion électrique lors de démonstrations, et prévoit l’utiliser pour un petit projet de construction qui sera réalisé cet automne. Le camion servira à déplacer des roches, des souches et de la terre sur le site minier.

De leur côté, les autres parties prenantes telles que Propulsion Québec, l’Institut du véhicule innovant (IVI) et le CNRC s’affairent à faire connaître les conclusions du projet.

Crédit photo : Nouveau Monde Graphite

Partenaires et financement

Ce projet est une initiative de l’Institut du véhicule innovant, réalisé avec Propulsion Québec, impliquant Adria Power Systems, Dana TM4, Fournier & Fils et Nouveau Monde Graphite comme partenaires industriels ainsi que le Conseil national de recherches Canada (CNRC) et CANMETMines comme partenaires de recherche. Le projet est réalisé grâce à la participation financière du Programme d’innovation et croissance propre dans les secteurs des ressources naturelles, du programme Innov-R et du programme d’appui à la recherche et à l’innovation du domaine minier (PARIDM). Le projet reçoit également une contribution financière du Fonds d’initiatives du Plan Nord et du Programme d’aide à la recherche industrielle (PARI).


Nous souhaitons aussi remercier Uniroc pour nous avoir accueilli pour les essais terrain.

Conclusion

Les essais approfondis réalisés sur le véhicule électrique démontrent qu’il est bien adapté aux exigences des mines à ciel ouvert au Québec. Malgré un dénivelé supérieur dans les mines, nos estimations d’autonomie de 3,5 heures pour une recharge d’une heure restent conformes aux objectifs initiaux. Cela met en évidence la nécessité d’une planification minutieuse des opérations pour optimiser son utilisation.

Sur le plan des performances, le véhicule électrique rivalise avec les camions diesel, notamment en vitesse de montée, essentielle pour la productivité. Cependant, il présente une réduction de 11,7 % de la capacité de charge lors du transport de matériel et des limitations en cycles d’opération selon les bornes de recharge. Économiquement, bien que l’acquisition d’un véhicule électrique soit plus coûteuse, les coûts d’exploitation pourraient être comparables, voire inférieurs à ceux des véhicules diesel, surtout avec une infrastructure de recharge optimisée.

Notre expérience suggère que le secteur des carrières est également prêt à adopter cette technologie, avec des ajustements minimes. Toutefois, des défis demeurent, notamment en ce qui concerne l’infrastructure de recharge. Il est essentiel de prévoir avec précision les besoins énergétiques de chaque site et de valider la disponibilité des entrées électriques. Selon les besoins spécifiques, des puissances de recharge plus élevées peuvent être nécessaires, ce qui peut ne pas toujours être compatible avec les entrées électriques existantes. De plus, la fiabilité demeure un enjeu. Bien que la plupart des problèmes puissent être corrigés dans une version améliorée, le véhicule actuel a été conçu pour prouver la viabilité technologique, sans optimisation pour une production commerciale. Il est donc essentiel de collaborer avec un fabricant capable de porter cette technologie à un niveau de maturité supérieur pour assurer son succès commercial.

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